Il y a quelques jours, le gouvernement a annoncé qu’il envisageait de nouvelles hausses du prix du tabac pour lutter contre le cancer.
Une des premières causes de cancer est le tabagisme. On est tous d’accord. Pour lutter contre le cancer, luttons contre le tabagisme. On est tous d’accord aussi.
Le prix d’un paquet de cigarettes est désormais à 10€
C’était une revendication des anti-tabac. La SEULE solution d’après eux pour réduire le tabagisme, c’est augmenter les prix. Le gouvernement Macron l’a fait, progressivement sur 3 ans à partir de 2018.
Notons qu’à ce moment là exactement, Santé Publique France annonçait une baisse très significative du nombre de fumeurs sur la base des chiffres 2017. Baisse qui n’avait donc rien à voir avec les prix des cigarettes. En observant plus précisément les données, sans avoir besoin d’une loupe, le lien avec l’essor fulgurant du vapotage depuis les années 2013 / 2014 est évident.
Le paquet de cigarette est donc passé à 10€. Pour quels résultats ?
Cette année en 2021, Santé Publique France a annoncé une nouvelle hausse du tabagisme. En particulier chez les femmes et dans les populations les plus démunies, les plus vulnérables. La solution de l’augmentation des prix semble donc avoir ses limites. Les spécialistes le savent bien, il suffit d’aller voir par exemple les données en Australie. Malgré les augmentations en continu, le tabagisme ne baisse plus depuis longtemps. Côté anti-tabac, on met ça sur le (bon) dos de la crise sanitaire.
D’un autre côté, l’augmentation des prix a été très favorable pour les rentrées fiscales. Même si des fumeurs ont arrêté ou réduit leur consommation, et que d’autres sont partis au marché noir, l’équation est très positive : deux milliards de taxes en plus chaque année. On est passé de 13,4 à 15,3 milliards annuels en deux ans. Bon plan !
Continuer à taxer plus les fumeurs : pour payer la crise sanitaire ?
La crise sanitaire va coûter très cher. On n’est pas encore entré dans cette séquence, mais ça va faire mal, très mal. N’imaginons surtout pas que ce seront les banquiers, les assureurs et le CAC 40 qui vont payer.
Le budget de l’état va être bien compliqué à gérer. Les fumeurs sont donc en première ligne, ce sont des vaches à lait idéales. Trop cons parce qu’ils fument, l’opinion publique ne prendra jamais leur défense. On peut envisager de les taxer encore plus, ça passera comme une lettre à la poste, surtout avec le prétexte très consensuel de lutter contre le cancer. Et vu l’expérience des trois dernières années sur les augmentations à 10€, les experts de la calculette à Bercy doivent déjà tabler sur les quelques milliards supplémentaires à engranger.
Et tout le monde s’y met ! En plus du ministère de l’économie, celui de l’écologie est en train de réclamer aussi sa part du gâteau. Un bon prétexte aussi, bien consensuel aussi : la pollution. Une nouvelle taxe est donc envisagée contre les mégots. Pour rappel, pendant des décennies, les anti-tabac ont quand même lutté (sur fonds publics) pour faire disparaitre les cendriers, ces trucs plutôt pratiques pour ne pas jeter les clopes par terre… Bref.
Avec deux milliards d’€, on peut faire baisser le tabagisme de 50%
Il y a 14 millions de fumeurs en France. Deux milliards, ça fait environ 150 € par fumeur. Ce montant pourrait être transformé en bon d’achat dans une boutique de vape spécialisée. Avec ça, on a deux petits matériels débutant très efficaces et environ 3 mois de liquides et consommables. Les conseils sont gratuits.
Si l’on se fie aux chiffres en Angleterre dans les Stop Smoking Services, avec une vape et un bon suivi, on est capable de dépasser les 50 % de fumeurs qui réussissent à arrêter de fumer. Un sur deux donc. La moitié des fumeurs qui pourraient arrêter de fumer en étant aidés très concrètement. En faisant un ratio élémentaire, si un sur deux réussi, améliorer l’espérance de vie d’un fumeur couterait donc 300 € par tête de pipe.
En Angleterre justement, dans la même logique, le Collège Royal des Médecins réclame une baisse de la TVA sur les e-liquide à 5% au lieu de 20%.
Utopique ?
Bien sûr, ça n’arrivera jamais.
Pourquoi ?
Parce que 7 millions de fumeurs en moins d’un coup, c’est immédiatement aussi presque 8 milliards de pertes en recettes fiscales. C’est énorme. Franchement ingérable. Surtout après avoir dépensé 2 milliards pour ces connards de fumeurs (même si, en fait, c’est leur propre argent).
Retour sur investissement ?
Assez faible au début, on gagnerait quelques milliers de vies en évitant des AVC et des crises cardiaques. Il y aurait aussi une réduction progressive des maladies pulmonaires. Mais il faudrait attendre au moins 20 ans, voire 30 ans, pour voir baisser les chiffres du cancer.
En bon gestionnaire (oui, j’ai écrit « bon gestionnaire »), l’État ne peut pas envisager de perdre 8 milliards par an en attendant plus de 20 ans le véritable retour sur investissement en économies sur les frais de santé.
Et actuellement, il faut s’organiser pour payer la facture de la crise sanitaire, alors c’est beaucoup plus facile de continuer à taxer les fumeurs pour leur prendre encore un peu plus, plutôt que d’envisager un gros trou (en plus) dans le budget de l’état (l’argent des fumeurs va à la sécurité sociale, mais si la sécurité sociale se retrouve en déficit, elle se tourne forcément vers l’état).
Dans le même ordre d’idée, la commission européenne envisage de taxer les produits du vapotage. Disons-le plus clairement, le projet est de taxer une solution qui aide à arrêter de fumer.
Il y a quelques mois, un conseiller dans un ministère m’a expliqué que c’est « normal », c’est une « opportunité fiscale », ça se passe comme ça. Il m’a coupé la chique.
Une autre fois, c’est un grand professeur de médecine, lié à certains anti-tabac, qui m’a dit qu’une baisse trop rapide du tabagisme n’est pas envisageable car ça pourrait désorganiser le système de santé en déséquilibrant le « système tabac » (fumeurs / taxes / business maladie).
Y’a des moments, on ne sait plus quoi répondre. Désespérant.
En ce moment on parle beaucoup d’être un « bon citoyen ». Je me demande si je ne devrais pas recommencer à fumer, pour le bien public évidemment ?