L’ANSES vient de publier un rapport sur les produits du tabac et du vapotage qui lui sont notifiés conformément à la réglementation.

Le rapport de l’ANSES a été publié ce mercredi, avec une communication à la presse. Vu le contexte, entre le nouveau confinement et l’attentat à Nice, peu de médias ont relayé l’information. Il y a eu quelques échos dans la presse, uniquement sur Internet, je n’ai rien vu en radio ou en TV. Comme d’habitude, les journalistes se focalisent sur les problèmes plutôt que les points positifs. On s’habitue.

Liquides avec ou sans nicotine : le « far west »

C’est l’angle choisi dans cet article chez LE POINT : Cigarette électronique : un tiers du marché échappe à tout contrôle. Un vrai sujet, car en effet, la réglementation qui limite le flaconnage à 10 ml et à un taux de nicotine à 20 mg/ml, a complètement bouleversé le marché. Vendre sans nicotine permet de dépasser la limite des 10 ml par flacon. C’est la solution pour vendre (et acheter) moins cher, en moins de deux ans, cette pratique a conquis au moins 30% du marché. Le sondage BVA, commandé par l’ANSES et réalisé auprès de vapoteurs, confirme ce phénomène.

Comme ces flacons sont sans nicotine, il n’y a pas de notification à l’ANSES. Voilà comment une réglementation créé plus de mal que de bien. Cela devrait alerter les pouvoirs publics sur les projets actuels au niveau de la commission européenne. Quelle pourraient être les conséquences d’une restriction des arômes (sauf tabac) ? Quelles conséquences de la mise en place de taxes sur les e-liquides ?

Il ne faudra pas s’étonner si les consommateurs recherchent des arômes via d’autres filières (arômes alimentaires). Voire qu’ils se tournent vers le marché noir. Dans ces cas là, il n’y aura définitivement plus aucun contrôle. Ni les fabricants, ni les consommateurs, ni les « défenseurs » du vapotage ne souhaitent se retrouver dans une telle situation. Seuls les pouvoirs publics semblent vouloir aller dans cette direction. Inquiétant.

Deux tiers des vapoteurs fument toujours

C’est le sondage BVA qui alerte sur ce point. Assez étrange que l’ANSES fasse ainsi le travail de SANTÉ PUBLIQUE FRANCE. On attend d’ailleurs avec impatience le prochain baromètre santé de l’agence, car sur une de ses dernières publications la proportion de vapofumeurs avait tendance à baisser par rapport aux vapoteurs exclusifs : BAROMÈTRE DE SANTÉ PUBLIQUE FRANCE 2017 – USAGE DE LA CIGARETTE ÉLECTRONIQUE – TABAGISME ET OPINIONS DES 18-75 ANS.

Vapoteurs fumeurs juin 2019 santé publique France

Dommage que les « journalistes » de l’AFP n’aient pas plus investigué pour écrire leur papier alarmiste qui a été repris par quelques médias : Tabac : deux vapoteurs sur trois sont également fumeurs. On connait l’AFP, il ne faut pas trop leur en demander.

Dommage car si l’on devait vérifier qu’effectivement le nombre de consommateurs « mixtes » est reparti à la hausse, cela pourrait aussi s’expliquer par le développement de pratiques qui ne permettent pas d’atteindre des dosages en nicotine nécessaires pour un bon sevrage.

Anomalies dans des déclarations, composés interdits et CMR (cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques)

A lire ici, un bon décryptage du rapport ANSES par des journalistes spécialisés dans la vape : France : les produits de la vape passés au crible par l’ANSES. Éclairage : très peu de produits sont concernés pour la question la plus grave, c-à-d la présence de CMR (cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques). Mais ce point a tout de même attiré l’attention des journalistes chez FRANCE INFO, avec un titre qui fait très peur : Cigarettes électroniques : des produits interdits trouvés dans des e-liquides, soupçonnés d’être cancérigènes ou de favoriser des malformations chez les bébés.

Les bébés, ça fait peur. Ne doutons pas un instant de l’intention malveillante du journaliste, titrer ainsi, c’est vouloir provoquer un bad buzz. Sans minimiser le problème, à nouveau le manque d’investigation peut tout à fait conduire à la désinformation. Comme l’explique très bien Jacques LE HOUEZEC dans un article « agacé » suite à la publication de l’ANSES, il est fort possible que les produits incriminés ne soient déjà plus sur le marché : Comment saper la vape juste avant le mois sans tabac !


En effet la liste des CMR est en constante évolution. Et les fabricants peuvent tout à fait modifier leurs recettes quand ils s’aperçoivent qu’un composant n’est plus considéré comme non problématique. Cela conduit alors à notifier de nouveau la recette. Pour illustrer ce phénomène, il ne faut pas se contenter du dossier de presse de l’ANSES, il faut ouvrir le rapport complet et aller à la page 55 sur 91 : Annexes du RAPPORT de l’Anses relatif à la déclaration des produits du tabac et des produits connexes en France – Produits du vapotage – Bilan 2016-2020.

Le graphique montre très bien qu’en très peu de temps les fabricants ont quasiment éliminé le diacétyle de leurs recettes. Dommage que le journaliste de FRANCE INFO, payé à priori pour investiguer, n’ait poussé sa souris jusqu’à cliquer pour lire le rapport complet. J’avoue… c’est du boulot.

Le rôle de l’ANSES : à quoi sert l’argent ?

L’ANSES est une agence de sécurité sanitaire. C’est écrit dans son nom. Pour moi, simple citoyen, ça veut dire que cette agence s’occupe de ma sécurité. Or les conditions dans lesquelles sort ce rapport sur le vapotage m’interpellent… M’interpelle aussi l’usage de l’argent collecté par l’ANSES.

Pourquoi l’ANSES parle de vapotage ? Parce que c’est l’agence qui a été mandatée pour recueillir les notifications de produits qui sont imposées par la réglementation. Sachant que cette notification est payante pour les fabricants. Le tarif est de 295€ par référence, comptant qu’un taux de nicotine est une référence. Donc un e-liquide avec 5 taux sera notifié 5 fois.

Depuis le début d’année 2020, cette notification n’est plus payante. J’ai entendu parlé d’une anomalie juridique. Mais quand même, sur les 33 814 produits notifiés, on peut imaginer que l’ANSES a, dans les premières années, au moins récupéré 30 000 redevances X 295 = 8,86 millions d’euros. C’est une estimation « personnelle » car l’ANSES n’a pas communiqué là-dessus. Manque de transparence qui interroge aussi, les citoyens ont le droit de savoir.

Avec plus de 8 millions d’euros collectés, l’ANSES a donc mis 4 ans à faire le tri dans un fichier Excel pour nous révéler des anomalies déclaratives. L’ANSES a mis 4 ans à alerter que certains produits (rares) peuvent contenir des CMR. L’ANSES a mis 4 ans à constater que 30% du marché passe complètement sous ses radars. En 4 ans, l’ANSES n’a pas eu le temps de consulter la littérature scientifique qui lui éviterait d’affirmer (à tort) qu’il y a encore des doutes sur l’efficacité pour le sevrage ou sur l’effet passerelle.

Autant dire que le « slogan » de l’ANSES : connaître, évaluer, protéger a vraiment du plomb dans l’aile.

Tout le monde avait pourtant compris il y a 4 ans que l’agence était là pour contrôler et analyser les produits. Mais non, en 4 ans, elle s’est contentée de récolter les millions et d’enregistrer les déclarations sans jamais mettre le nez dedans. C’est inquiétant. Autant dire qu’un fabricant aurait pu déclarer mettre du caca dans ses produits, ça ne pose aucun problème à notre agence de sécurité sanitaire. Pour les consommateurs qui veulent vérifier la qualité de leurs produits, l’ANSES a mis à votre disposition un fichier de 33 000 lignes, bon courage pour retrouver votre référence ! Avec 8 millions d’euros, on aurait pu espérer un outil de consultation un brin plus élaboré…

À la veille du Mois Sans Tabac, faut-il avoir peur du vapotage ?

Bien sûr que non. Quand bien même certains produits pourraient ne pas être parfaits, vapoter est beaucoup moins risqué que fumer. Si on cherche des défauts, on en trouve toujours, par exemple : Voici les marques d’eau en bouteilles qui pourraient posséder des polluants.

Tout le monde est d’accord (consommateurs, fabricants, commerçants…) pour travailler avec le maximum de vigilance sur la qualité des produits. Parce que c’est primordial pour lever les « doutes » insensés qui sont colportés sur le vapotage. Parce que c’est nécessaire pour que cette solution participe pleinement à la lutte contre le tabagisme.

Voilà à quoi n’ont PAS servi les millions d’euros collectés par l’ANSES. Où est l’argent ?

Je suis vraiment très inquiet quand je lis dans le communiqué de presse que l’ANSES va être partie prenante sur les prochaines dispositions de la commission européenne concernant les produits du tabac et du vapotage. Les à priori de l’agence n’augurent rien de bon pour les consommateurs.

 

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