Sous la plume de Stéphane HOREL, le quotidien LE MONDE présente les défenseurs de la réduction des risques comme un lobby à la solde de l’industrie du tabac.

[EDIT du 22 décembre 2020]

[Début de l’article original publié le 20 décembre 2020]

Le vapotage n’est pas autre chose qu’un complot de l’industrie du tabac pour pervertir la jeunesse avec la nicotine. Voilà en substance la trame de l’article publié ce week-end dans Le Monde par la journaliste Stéphane HOREL. Cette version de l’histoire avait déjà donné lieu à un reportage sur ARTE. Les experts (érudits surtout) n’avaient pas hésité alors à qualifier le reportage de « révisionnisme ». Forcément, je m’en étais ému : ARTE sème le doute sur le vapotage en révisant son histoire.

Sur les conseils d’un ami (qui se reconnaîtra sûrement), j’avais acheté l’an dernier le livre de Stéphane HOREL « Lobbytomie« . J’avais même payé le prix fort pour le lire rapidement, alors que je n’achète d’habitude que des livres de poche, mesure économique nécessaire vu ma consommation (ha… les addictions…). J’avais réussi à le finir, mais au prix d’une lecture souffreteuse (d’autres amis m’avaient prévenu). Outre le style littéraire (fatigant), j’ai ressenti un profond malaise face à une auteure qui tente de me convaincre que le monde est noir ou blanc, que les méchants sont toujours les mêmes et les gentils aussi. N’étant pas expert sur les sujets, je n’ai pas cherché à vérifier les allégations et démonstrations de Stéphane HOREL. Les petits passages sur l’industrie du tabac et surtout la référence à Stanton GLANTZ, un faussaire scientifique anti-vape bien connu, m’avaient quand même laissé un brin soupçonneux sur l’ensemble du bouquin.

Lorsque j’ai donc vu passé hier un article signé de Stéphane HOREL et titré Petites ficelles et grandes manœuvres de l’industrie du tabac pour réhabiliter la nicotine, mes warning se sont éclairés. Ma première pensée à été que les anti-tabac extrémistes avaient réussi à corrompre la journaliste avec leurs théories du complot concernant la nicotine et le Covid. Mais lorsqu’un fidèle lecteur m’a adressé la version complète de l’article, la lecture m’a totalement abasourdi. Stéphane HOREL va jusqu’à « démontrer » que les défenseurs de la vape (réduction des risques) ne sont que ses suppôts de l’industrie du tabac. Attaques ad hominem contre Clive BATES et Konstantinos FARSALINOS, appels et références à des « experts » anti-vape notoires gavés de liens d’intérêts, allégations sans ressources, raccourcis, mensonges, amalgames… Tout y est !

La journaliste « anti-lobby » s’est fait plaisir. Mais est-elle consciente qu’elle pourrait être elle même manipulée et participer ainsi à un complot bien plus complexe que ce qu’elle croit avoir découvert ? C’est l’histoire de l’arroseur arrosé. Une anti-lobby qui œuvre en fait pour de puissants lobbys, et en lien avec l’industrie du tabac ! Si elle s’est « seulement » fait piégé, c’est pathétique pour une « grande journaliste qui écrit des livres ». Si elle est partie prenante et consciente, c’est beaucoup plus grave.

Je délire ? Non, mais je ne suis pas suffisamment expert pour aller chercher tous les détails. Alors je publie les notes de Philippe POIRSON, avec son autorisation bien sûr. Très grand MERCI, car c’est « succulant » et il aurait été dommage de gâcher une si belle matière en ne la rendant pas accessible à tous ceux qui se posent des questions. Pour être « transparent », Philippe est un expert de la réduction des risques, simple citoyen, sans aucun lien d’intérêt avec les industries du tabac, de la pharma et de la vape. Membre actif de HELVETIC VAPE, SOVAPE et ETHRA, il publie régulièrement sur son blog VAPOLITIQUE. Il écrit également deux fois par an un article sous la rubrique « Vaporama » dans le magazine VAPYOU, payé 200€ l’unité soit 400€ de revenus annuels « grâce » à la vape. Bouh le vilain !

Le sujet est très sérieux. Faut pas rire. Mais à la lecture des remarques croustillantes de Philippe, on ne peut s’empêcher d’au moins sourire quand la « grande presse » et les donneurs de leçons se prennent ainsi les pieds dans le tapis. Mais après avoir ri, en prenant du recul, en se ressaisissant sur les enjeux, les millions de vies qui sont concernées, on pleure…

Décryptage de l’article de Stéphane HOREL dans LE MONDE, par Philippe POIRSON

Ça commence très fort dès les premières lignes. Bonne lecture !

The Investigative Desk est financé par Bath University, qui tient elle-même ses fonds de Bloomberg. Le financier américain manoeuvre pour transformer la lutte anti-tabac en lutte contre la réduction des risques. Ses affaires liées aux nations tabagiques comme l’Inde et la Thaïlande jouent de toute évidence un rôle dans cette orientation. Les auteurs et plusieurs intervenants dans l’article ne mentionnent pas ce conflit d’intérêt majeur et très problématique.

L’OMS le certifie mais les auteurs ont-ils vérifié les données scientifiques de cette affirmation ? Au vu des nombreuses boulettes de l’OMS cette année, cela semble le minimum de la part de journalistes qui seraient un tantinet sérieux…

L’argument a un certain poids si la publication se voulait conclusive. Ce qui n’est pas le cas, elle est présentée comme une hypothèse. L’argument invalide également les affirmations de l’OMS citées au-dessus pour la même raison. Et il justifie alors de faire un essai clinique tel que celui lancé, dont les auteurs estiment en attaque de l’article qu’il « embarasse ».

Note: Il y a un vrai problème de compréhension des distinctions de statut des publications au fil de l’article. C’est très surprenant de la part d’une journaliste se présentant comme spécialiste du domaine comme Stéphane Horel.

La cellule Tobacco Control Research Group à Bath (Bath TCR) dirigée par la Pr Anna Gilmore bénéficie d’un budget de 20 millions $ alloué par Bloomberg. Au vu des liens d’affaires que celui-ci entretient avec les producteurs de tabac d’Inde et de Thaïlande, cela devrait être mentionné comme conflit d’intérêt dans un article qui traite justement de possibles conflits d’intérêts dans le secteur d’activité du tabac. Le Bath TCR est directement lié au GGTC, une cellule créée par l’Etat de Thaïlande, qui détient le monopole du tabac, et Bloomberg, à travers plusieurs de ses organisations. Pour le coup, on peut dire que cette omission des conflits d’intérêts de cette intervenante et des auteurs est vraiment « embarrassante ».

Une question qui aurait été intéressante est comment des chercheurs peuvent obtenir des fonds pour étudier les effets de la nicotine. Il y a un corpus d’études qui montre des effets psychoactifs de la nicotine, potentiellement intéressants pour certains troubles. Mais lorsqu’une étude est lancée sur financement public, souvent on a un article comme celui-ci pour mettre en cause le bien-fondé et l’honnêteté de la recherche. En filigrane, Changeux avait-il d’autres options de financement pour mener sa rechercher initiale sur la nicotine qui a ouvert d’énormes perspectives en neurosciences, au delà de la nicotine et des récepteurs nicotiniques.

Les auteurs de l’article passent complètement à côté du sujet, mais je soupçonne que ce n’est pas involontaire vu leur traitement à sens unique contre toute recherche scientifique sur le sujet. La violente suspension de la recherche du Dr Gabriel Villafane à l’hôpital Mondor sur le traitement par nicotino-thérapie de malades du syndrome de Parkinson n’avait pas fait beaucoup de lignes dans le Monde en 2017, par exemple… (il y en a d’autres).

Les scientifiques sont-ils responsables des enflammades de Christopher Snowdon dans son style provocateur? Il est un chroniqueur bien connu pour son aversion du neo-puritanisme promut par le réseau Bloomberg pour justifier la répression de la réduction des risques. Que cela ne plaise pas à Anna Gilmore et aux auteurs de l’article, on l’aura compris. Mais cela n’a rien à voir avec le bien-fondé ou non des recherches en question.En réalité il y a deux raison à cette mention qui n’ont rien à voir avec celle avancée par l’article. La principale est que l’OMS a fait campagne contre la cigarette et le vapotage à l’occasion du Covid, ce qui justifie la réaction de Christopher Snowdon. Les auteurs ne semblent pas avoir vraiment suivi attentivement cette actualité pour le saisir. Une autre est que Christopher Snowdon est vapoteur.

Stéphane Horel aura un choc le jour où elle va découvrir que ses tomates non-OGM, ses aubergines, patates, poivrons etc , contiennent de la nicotine, toujours.

Cette phrase montre le niveau zéro de compréhension des auteurs. Pour deux raisons. En premier lieu, personne ne prétend à l’innocuité du vapotage ou d’autres produits à risques réduits, parce que justement, ils sont à risques réduits. La seconde est que personne ne peut démontrer une absence de risque totale pour quoi que ce soit, par définition. C’est une demande stupide quel que soit le sujet. Le Monde ne peut pas prouver l’innocuité de sa lecture sur ses lecteurs. Cette phrase est une simple astuce de journalistes racoleurs… Du bullshitting.

Malheureusement, l’industrie du tabac n’est pas déclinante au niveau mondial. L’Investigative Desk aurait pu appeler leur patron Bloomberg pour avoir cette information. En arrière-fond des campagnes anti-vape et anti-réduction des risques, il y a une bataille commerciale entre les pays producteurs de tabac comme l’Inde, la Thaïlande et rival de l’Inde et en partenariat avec Philip Morris l’essor du tabac au Pakistan. La seconde chose est que le volume financier des cigarettiers « occidentaux » ainsi que leur marge bénéficiaires n’ont jamais été aussi élevés qu’en 2016. Le déclin a commencé seulement à ce moment là avec la conversion suffisamment importante de fumeurs aux produits à risque réduit, en particulier le vapotage. Ceci éclaire de manière très différente la suite de l’article qui s’en prend à des personnes qui ont contribué d’une manière ou d’une autre à cet essor de la réduction des risques face au tabagisme ces dernières années.

Globalement, le nombre de fumeurs a augmenté dans le monde ces dix dernières années, malgré sa baisse dans les pays où le public a pu accéder à des outils de réduction des risques tels que le vapotage et le snus. On comprend que l’enjeu derrière cet article calomnieux est de freiner cette baisse dans les pays où le vapotage fait dégringoler le tabagisme.

Pour les mêmes raisons – financement de Bloomberg et partenariat avec la cellule de propagande Thaïlandaise GGTC, elle même piloté par l’Etat Thaïlandais qui détient le monopole du tabac, – Anna Gilmore et sa cellule Bath TCR doivent être considérées comme une organisation-écran des industries du tabac d’Inde et de Thaïlande.

[1] Ah ? J’avais jamais entendu. Ridicule.

[2] Sans aucune explication, le lecteur a bien compris que c’est mal.

Les auteurs font un procès politique en raison de l’engagement de Clive Bates pour une stratégie de réduction des risques contre le tabagisme. Difficile de voir autre chose qu’une chasse aux sorcières comme le remarque Konstantinos Farsalinos plus loin.

Là c’est gênant d’un point de vue purement journalistique., parce que les faits rapportés sont erronés. La publication de Peyton et al. dans le NEJM n’était pas une étude, ce n’était qu’une lettre. C’est un tout autre statut de publication. C’est ahurissant que Stéphane Horel ne sache pas cette distinction ultra basique dans la publication scientifique. Et comme ce n’est pas une étude, elle n’a pas établi de manière scientifique quoi que ce soit. Par contre elle affirmait sans souscrire aux standards de publication des dégagements inquiétant et improbables de cancérigènes de la vape. Depuis, on sait comment Peyton et al. ont procédé pour obtenir ces chiffres absurdes. Ils ont fait brûler les vapoteuses en les poussant bien au-delà de la puissance maximum prévue et possible en condition réaliste. Tout ce passage est plus qu’erroné.

David Peyton et son équipe ont touché un crédit de recherche de plus de 3,5 millions $ suite au buzz qu’il a réussi à faire avec sa lettre infondée sur les taux de cancérigène dégagée par la vape. Donc oui, suivez l’argent ! Ce type a vu sa carrière boostée avec une lettre aussi trompeuse, et du même statut non scientifique, que celle qui a été utilisée par les labos pharmceutiques pour vendre leurs opioïdes de synthèse à des millions d’américains en prétendant qu’ils n’étaient pas addictifs. Ce sont les mêmes ficelles qui sont utilisées par le même milieu. C’est choquant de s’apercevoir que Stéphane Horel n’a rien de neutre dans ces histoires de lobbys qu’elle prétend dévoiler…

Exercer son droit d’expression et la liberté d’opinion sur des sujets de politiques de santé est devenu suspect, visiblement ! Le monde rêvé de Stéphane Horel ressemble à 1984.

Le Monde nous apprend ce qui est déjà connu et déclaré par Konstantinos Farsalinos. Ça fait beaucoup de pages pour une information connue.

De la même façon que les auteurs n’ont pas compris les distinctions des statuts de publication précédemment, ils ne semblent pas au courant précisément des standard éthiques.

L’article donne parfois l’impression d’avoir été écrit par un stagiaire débutant dans le journalisme. En réalité, le Dr Konstantinos Farsalinos est au Centre Onassis de cardiologie d’Athènes. [Engueulez le stagiaire, sérieux!]

M. Poulas n’en a jamais fait état, sauf qu’il l’a dit quand même… !

Ce qui est une grande différence avec Bloomberg qui ne publie jamais ses déclarations d’impôt de peur que ses liens financiers soient questionnés, concernant sa pseudo activité « philanthropique ». Comme par exemple être lié d’intérêt avec des industries du tabac et de la pharmaceutique et financé des campagnes contre les outils de réduction des risques pour les fumeurs, tel que le vapotage.

Il y a comme une histoire de paille et de poutre dans cet article…

 

 

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