7 novembre 2017. Le Mois Sans Tabac a débuté il y a une semaine. Et ce matin, tous les médias titrent sur l’inefficacité de la « cigarette électronique » pour arrêter de fumer. Décryptage sur l’organisation d’une journée de désinformation sur le vapotage.

Voici un exemple parmi des dizaines d’articles sortis aujourd’hui concernant le vapotage, c’est FRANCE INFO : La cigarette électronique efficace pour réduire la consommation de tabac, mais pas pour arrêter définitivement. Certains médias enfoncent encore plus le clou, le champion de la journée est sans doute LE POINT avec le titre « Tabagisme : vapoter n’est pas arrêter ». Tout y est, amalgame et mensonge incroyable. Tous les ex-fumeurs, parfois encore vapoteurs (pas tous, car certains ont arrêté la vape), au moins 1 million de personnes en France (chiffres Eurobaromètre 2014), n’en croient pas leur yeux ou leur oreilles. Car tous les médias ont repris l’info.

Origine garantie : ©Santé Publique France

Tout est parti de la publication par Santé Publique France du Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, N° du 7 novembre. Comme de coutume, les médias avaient reçu l’accès au BEH quelques jours auparavant, sous embargo. Rien d’anormal, cela permet de s’organiser pour préparer des sujets, inviter des spécialistes.

On trouve dans ce numéro deux sujets, dont un sur le vapotage. Il s’agit d’une enquête « observationnelle » menée sur des vapoteurs et des vapofumeurs. On peut lire l’article (lien ci-dessus) ou apprécier le regard de Jean-Yves Nau qui commente, Cigarette électronique : comment observer son efficacité sans parvenir à la conseiller. 

Mais pour les « spécialistes » qui s’intéressent de près au sujet, on peut surtout se demander pourquoi cette étude bénéficie d’une publication dans le BEH maintenant, avec l’écho naturel que suscite la publication ? Cela est très étrange, car justement elle est sortie depuis déjà quelques mois… On retrouve d’ailleurs une interview de Anne Pasquereau – 1er Auteure – datée du 30 mai 2017. Un lien est disponible vers « l’étude » publiée dans ADDICTION.

Question : pourquoi avoir attendu presque 6 mois pour publier dans le BEH ? Et pile poil en plein Mois Sans Tabac ? C’est quand même troublant non ?

2014 : la préhistoire pour le vapotage

Merci à Jean-Pierre COUTERON, président de Fédération Addiction. Il a orienté vers moi une journaliste de France Info pour la Matinale animée par Bruce TOUSSAINT. Ils cherchaient quelqu’un qui puisse réagir dans le « camp » des « défenseurs » de la vape. J’ai eu 4 minutes pour tenter de répondre du mieux possible aux graves incertitudes que soulèvent la publication du BEH. Je me suis levé à 6h de matin pour être à 7h30 dans les locaux de France Bleu Isère et faire le duplex. Voici l’interview qui m’a également permis de parler du groupe Facebook Les vapoteurs #MoisSansTabac :

 

Je connaissais donc l’étude depuis 6 mois, et je m’étais rafraîchi la mémoire avec Jacques LE HOUEZEC la veille. On a passé à peine 10 minutes à relire les notes réalisées par Jacques à l’époque, l’étude est totalement biaisée. Le Pr. DAUTZENBERG s’en est d’ailleurs ému sur Twitter, sans concession pour Santé Publique France. On peut également lire l’analyse de Philippe POIRSON, toujours prompt à décrypter les études en allant vérifier les données brutes. Mais encore et surtout :

  • l’enquête date de 2014 ! On porte donc un jugement AUJOURD’HUI sur ce qu’il se passait il y a plus de 3 ans. Autant dire pour le vapotage : la préhistoire. Evolution des matériels, progrès sur les accompagnements, bonnes pratiques pour les débutants, on est déjà dans un autre monde avec des taux de réussite largement supérieurs…
  • pire ! Pourtant en 2014 déjà, on SAVAIT avec l’Eurobaromètre qu’au moins un million de français avait arrêté de fumer grâce à la vape. Encore plus incroyable, sur le site même de Santé Publique France, on trouve les chiffres de l’INPES qui affirme, toujours en 2014 qu’il y a au moins 400 000 personnes vapoteurs exclusifs, comment imaginer qu’ils ne soient pas des ex-fumeurs ?
  • et troisième « biais » vraiment important, dans l’étude on nous parle de « vapofumeur » qui n’arriveraient pas à arrêter de fumer, mais aucun détail n’est donné sur leur pratique du vapotage. Tout juste sait-on qu’ils sont « consommateurs réguliers ». Or on sait bien que quelqu’un qui ne vapote pas tous les jours ou encore qui vapote sans nicotine, n’a que très peu de chance d’arrêter de fumer.

Bref ! Comme je le dit à la radio, l’étude est complètement biaisée et dépassée.

Médias copier / coller : désinformation sur le vapotage

On a donc vécu une horrible journée. Des vapoteurs ulcérés dans les réseaux sociaux. Ils sont des centaines de milliers à avoir arrêté de fumer grâce au vapotage, mais les médias affirment que ça ne marche pas. Il n’existent pas !

Surnaturel. Déni officiel. Incurie des autorités et négligence des médias. En plein Mois Sans Tabac, alors que nous avons 14 millions de fumeurs qui sont forcément sensibles à l’opération et pourraient légitimement se demander s’il n’essayerait pas le vapotage pour sortir de leur tabagisme.

Il n’y a pas de mots pour qualifier ce qu’il s’est passé aujourd’hui. Pas de mots pour qualifier les responsables de se massacre intellectuel et sanitaire. C’est honteux et indigne d’un pays qui compte plus de 34% de fumeurs !

Merci quand même à FRANCE INFO et Bruce TOUSSAINT de m’avoir donné la parole, même si 4 minutes, c’est vraiment très peu face à l’avalanche des articles assassins dans toute la presse. Cette minuscule intervention a permis de voir arriver des fumeurs sur groupe Facebook Les Vapoteurs #MoisSansTabac.

Merci aussi à LIBERATION pour cet interview hier de Jacques LE HOUEZEC, Vapotage : «Les autorités restent frileuses, comme gênées». A part ces deux interventions, depuis le début du Mois Sans Tabac, depuis même des mois, des années, les spécialistes et défenseurs de la vape sont complètement bâillonnés. Oubliés. Méprisés.

Après 5 années à se battre contre l’aveuglement de Marisol TOURAINE, la nouvelle ministre a donné le ton. Elle refuse de recevoir les associations de la vape. Trop occupée sans doute à « rassurer » les buralistes, qui eux, sont reçus par Agnès BUZYN au ministère de la santé.

C’est un cauchemar.